— Mon cher seigneur ?
— Ces braves gens qui vous accompagnent, dites-moi, nous les quittons demain ?
— Les quitter ?
— Ensemble ! Plus de séparation. La première année, le premier jour de notre République, ce sera demain. Vous et moi, nous la proclamerons sur ces hauteurs. À plus tard les cérémonies. Nous en ferons la moisson et les lierons en gerbe pour les offrir au monde, avec nos compliments. Demain !
— Vous ne parlez pas sérieusement ?
— Je suis sérieux comme le Talmud. Décidez tout de suite, dans l’exaltation merveilleuse de cette heure.
— Je ne puis vous écouter, cher seigneur.
— Mais votre cœur bat.
— Je ne suis pas maîtresse de ses battements.
— Dites que j’en suis le maître, alors. Je prépare tout pour demain ?
— Non, non, non ! Mille fois non ! Vous avez lu trop de romans et de poèmes. Je devrais, si j’étais sage, vous repousser avec dédain.
— Allez-vous me faire faux-bond, jouer au feu follet, me filer encore entre les doigts ?
— Il faut me conquérir selon les règles, loyal chevalier.
— Voulez-vous au moins vous laisser conquérir ?
— Et vous, êtes-vous bien cet Alvan qui ne voulait pas être centaure ?
— Je suis un malheureux qui poursuivais un feu follet et qui ai rencontré un rétiaire dont le filet m’emprisonne la tête et les bras. Je croyais avoir affaire à une femme, une femme qui demandait protection, et voici qu’homme ou centaure, elle me