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LES COMÉDIENS TRAGIQUES

en mains. Demain, elle fera le lutin, la fée, la coquette parisienne, tout ce qu’il lui plaira, et j’en serai ravi. Tout ce que je demande aujourd’hui, c’est du sérieux dans cette affaire. Car c’est bel et bien d’une affaire, d’un rendez-vous d’affaires, qu’il s’agit. Je connais à fond le cœur de Clotilde, et je sais qu’en obtenant cette heure, je l’obtiens elle-même. Seulement — il pressa le bras de son ami — … Mais vous me comprenez, mon cher Tresten. Vous êtes plus heureux que moi, pour l’instant. Faites les choses aussi vite que possible. Vous me retrouverez ici. Je vais prendre un livre, un pandecte. Je ne me sens pas en train de travailler. Le premier bouquin venu ; tout m’intéressera. J’irais bien faire un tour ou ramer sur le lac, mais je veux être tout prêt à vous recevoir. Vous devez retrouver Störchel chez le général ?

— C’est là, en effet, que nous nous sommes donné rendez-vous.

— Je ne l’ai pas vu ce matin. Je n’ai rien à lui conseiller. Il en a toujours été de même avec Clotilde : il lui suffit de me voir pour reprendre courage. Elle s’en rend compte et se sent une femme nouvelle, dix fois plus heureuse de cette énergie que je lui insuffle. Soyez persuadé qu’elle sera ravie de tout arrangement qui pourra lui assurer mon appui. Faites-vous pressant, s’il le faut, mon bon ami, sous peine de risquer de la désappointer. Quant à Störchel, il n’aura qu’à regarder et à enregistrer ; c’est à peu près tout ce qu’on lui demande. Grimpons au Mont Blanc aujourd’hui, Tresten. C’est un jour idéal pour une ascension, un des rares jours de cristal de l’août de ce pays. Du sommet, nous contemplerons à loisir les royaumes de la