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L’ÉGOÏSTE

son procédé, car elle s’arrêta court où il refusait de commencer. Il plongeait sous la surface avant de lire la table des matières. Il avait gagné la main de Miss Middleton ; il crut avoir captivé son cœur ; mais il n’était pas si certain de la possession de son âme ; il courut après. Notre gentleman énamouré n’avait point reçu d’encoches de la Nature, pour marquer ses découvertes dans les profondeurs. C’est l’inconvénient des plongées, que lorsqu’on ne s’éclaire pas, il faut beaucoup labourer, ce qui jette le trouble au fond si gentil. Les traits de Miss Middleton étaient visibles, jusqu’à déceler la source de ses moindres impressions. Il put voir qu’elle avait de l’énergie avec un naturel amour de la liberté, ce qui impliquait le besoin d’espace, si elle était laissée à elle-même. Ces traits, malheureusement, au lieu de s’en servir comme une porte d’entrée dans l’intérieur, il s’en servit comme d’un miroir pour s y refléter lui-même.

Ces traits de grande douceur devaient tenter, en effet, un amant accepté à s’y accrocher. Mais il avait découvert que sur deux ou trois points leurs opinions différaient. Que sa fiancée pensât autrement que lui, ce fut odieux pour sa tranquillité. Obstinément, il revenait à la charge pour lui démontrer son erreur sous des aspects variés. Il entendait modeler son caractère de telle manière qu’il épousât le sien, et il trahit quelque surprise en la voyant se faire l’avocate de ses idées. Elle dit immédiatement : « Willoughby, il est encore temps » et le