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CHAPITRE X

quitte le voisinage du château. Tout son cœur est dans ce pays, c’est la passion de cette pauvre âme. Comptez sur son consentement. Mais elle a besoin d’un peu d’adoration… Ah ! l’adoration de ce vieux Vernon ! Imaginez-vous le tableau, mon amour ! Je présume qu’il traitera sa dame comme un dictionnaire, feuilletant à la recherche d’un mot, puis tournant hâtivement les pages à la recherche d’un autre mot, jusqu’à ce qu’il ait constitué la phrase. Ne rembrunissez pas votre front, ma Clara. Certains parlent avec leur langue, d’autres ne le peuvent. Il y en a qui ne sont que des bâtons tout secs ; des hommes virils, d’honnêtes compagnons, mais si élimés, si frottés de vernis, qu’ils s’en écartent du sexe et qu’ils leur faut des imprévus pour remplacer les filaments soyeux qui doivent les attacher. À présent Willoughby riait tout près de la figure de Clara, pour mobiliser son regard de rêveuse fixité. À présent, je puis vous l’affirmer, ma chérie, je comprends tout. Vernon ne sait pas parler, comme nous parlons. Il a, ou il avait, une rampante affection pour Miss Dale. Ce fut la chose du monde la plus divertissante. Oh ! ses assiduités ! L’air d’un dogue qui n’a pas la conscience tranquille et qui tente de se réconcilier avec son maître. Nous fûmes tous en humeur de rire. Naturellement cela tourna à rien.

— Est-ce que Mr. Whitford, en déclinant ce mariage, vous offenserait à l’extinction ?

En réponse à sa bêtise, Willoughby soufflait un affectueux : Ah ! bah !