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nes, a su s’y opposer. C’est lui qui donna à Adam la femme comme compagne. Avant que l’affranchissement de la lumière eût pu se faire, Ève souffla en l’âme d’Adam une force terrible, un pouvoir infini et destructeur de tout : l’amour. Sous la pression de cette puissance, Adam dispersa, affaiblit et perdit l’éclat de son esprit. Il concevait dans l’amour ses enfants qui furent héritiers du péché et de la misère. Et comme il en a été avec Adam, il en a été aussi avec lui, Dioclès, son descendant lointain.

Et alors un gémissement profond s’échappa de sa poitrine. Le gémissement de la vie. Il apprit une fois pour toutes que l’amour de la femme et la procréation amenaient l’embrouillement de l’esprit clair dans la matière. Et par trois fois il reconnut pour loi irrévocable le mépris des plaisirs charnels : sceau de la poitrine.

Et ensuite en un soupir rêveur il vit la deuxième loi du grand hérétique : épuration de l’esprit par son passage des corps humains dans les corps des bêtes et des plantes. Et il comprit profondément que l’âme des bêtes faisait partie de Dieu. C’est pourquoi il avoua à lui-même que tuer les bêtes, couper un épi et cueillir un fruit était égal au meurtre, car de cette façon on arrêtait par la force le développement de la lumière enfermée dans la bête et dans la plante.

Et par trois fois il reconnut pour loi irrévocable la liberté des troupeaux, des champs, des bois, des rivières et du steppe : sceau de la main.

Désormais il se noya entièrement dans la science du grand mage.

Et il rêvait de l’ange sacré de la lumière, qui, ayant pris la forme du serpent, exhortait le premier homme à enfreindre la loi — et avait amené le genre humain à la haute connaissance de lui-même ;

de l’ange lumineux, fils du soleil, qui, ayant pris la forme du serpent, — errait parmi les hommes en leur enseignant la vérité sur la nature humaine ;

de la lutte du fils du soleil contre le royaume de l’obscurité et de la victoire des princes des ténèbres qui s’étaient emparés d’une partie de l’armure du soleil ;

du Seigneur qui avait alors envoyé au secours de l’homme