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le tueur de grenouilles

sac, ventre gonflé de petits ventres qui soupirent et expirent encore. Chez lui, c’est l’heure du repas et il allume paisiblement ses fourneaux. Le vent passe, soufflant le feu. La terre gémit, doucement grondeuse. Non, plus personne ne peut l’empêcher de manger à sa faim, de vivre. Il est libre.

À genoux devant le tas des petits cadavres, il les déshabille, leur ôte la double boucle de leurs yeux d’or, leur enlève leur jolie robe de satin vert, leurs mignonnes culottes de velours blanc. Tout cela glisse pêle-mêle comme des vêtements de poupée, et il ne reste plus que les cuissettes nues, très pâles, agitées de frissons nerveux…

… Et les prunelles fixes de l’homme ont une flamme étrange, lueur de convoitise ou de haine, durant qu’au loin les chiens hurlent à la lune, rêvant de mordre la Mort au cul.

rachilde.