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quent. Or cette restriction, malgré l’effroi que tout d’abord elle cause, est seule propre à rassurer ceux dont l’aspiration métaphysique s’exerce à la lumière et sous le contrôle de l’Intellect. A ceux-ci les lois de la Connaissance sont connues ; ils savent qu’elles n’engendrent rien d’achevé, rien qui comporte avec une construction finie un apaisement et une solution. Ils savent que c’est en retirant la solution métaphysique, ainsi que sa nature l’exige, du domaine de la Connaissance, en la scellant de la pesanteur du mystère, qu’elle échappe à toute puérilité en même temps qu’à la loi d’insatiabilité qui régit tout désir.

III

Au retour de cette exploration dans le domaine métaphysique, on entend formuler cette question plus immédiate : la philosophie de la Connaissance engendre-t-elle la morale ? Mais on sait maintenant que cette question peut être posée par ceux-là seuls qui, à la manière théologique, voient dans la faculté de connaître les sources de la vie, dans une catégorie de la raison le principe de la morale et dans la vérité la cause du réel. La philosophie de la Connaissance, ainsi qu’on vient de l’exposer, a précisément pour objet de mettre l’esprit en garde contre ces confusions. Elle ne peut donc avoir de réponse pour une question posée en ces termes et grosse de la préoccupation théologique qu’elle dissimule.

Mais comme elle a fait pour les métaphysiques elle regarde la Vie et constate que des morales existent. Le phénomène moral se révèle comme un fait ; il est une réalité au même titre qu’une variété végétale ou qu’une espèce animale. A ce titre, il