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nifestent ainsi comme les attributs d’une énergie donnée, à ce titre comme des réalités. Il n’y a pas à s’enquérir si elles sont vraies, — s’enquérir si une réalité est vraie ne comporte aucun sens, — mais à déterminer leur nature et les conditions sous lesquelles elles se produisent. Or on les voit indissolublement liées à une énergie physiologique en dehors de laquelle elles n’ont point d’existence. Il en faut déduire qu’à cette énergie physiologique appartient la réalité véritable, la qualité, la quantité et le pouvoir d’engendrer des effets. Les métaphysiques et les morales sont les ombres où se représentent, dans le monde de la mentalité et de la motivation, cette qualité, cette quantité et ce pouvoir de causalité du réel. Ainsi peut-on les définir des réalités mythologiques, des fictions aussi, en ce sens que toute représentation diffère par nature de l’objet qu’elle représente et n’est jamais une adéquation. Mais par suite d’une inversion qui est l’essence même du monde moral, c’est d’après cette représentation mythologique, où le réel nous apparaît, que nous apprécions le réel ; c’est à ces ombres portées que, pour la facilité du langage, nous attribuons le pouvoir effectif qu’elles figurent, Ce qu’il nous faut donc considérer dans les métaphysiques et les morales, c’est leur harmonie logique d’une part, qui atteste l’harmonie et l’équilibre de l’énergie physiologique qu’elles représentent ; c’est, d’autre part, leur efficacité à déterminer des croyances et des actes utiles qui témoignent de la force et de la santé de cette énergie. Or, cette efficacité se mesure à leur pouvoir d’illusionner. C’est donc en ce pouvoir d’illusionner que consistent l’importance et la réalité véritable des métaphysiques et des morales ; c’est là qu’en bon con-