Page:Mercure de France - 1900 - Tome 33.djvu/434

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la maison s’écroula bruyamment et je n’osai pas continuer. Je perdis courage et demeurai étendu sur le sol pendant longtemps, n’ayant même plus l’idée de bouger. Après cela, j’abandonnai définitivement l’idée d’échapper par une tranchée.

Ce n’est pas un mince témoignage en faveur de la puissance des Marsiens que de dire qu’ils m’avaient fait, dès le premier abord, une impression telle que je n’entretins guère l’espoir de nous voir délivrés par un effort humain qui les détruirait. Mais la quatrième ou la cinquième nuit, j’entendis un bruit sourd comme celui que produiraient de grosses pièces d’artillerie.

C’était très tard dans la nuit et la lune brillait d’un vif éclat. Les Marsiens avaient emporté ailleurs la machine à creuser et ils avaient déserté l’endroit, ne laissant qu’une machine de combat au haut du talus opposé et une Machine à Mains qui, sans que je pusse la voir, était à l’œuvre dans un coin de la fosse immédiatement au-dessous de ma lucarne. À part le pâle scintillement de la Machine à Mains, des bandes et des taches de clair de lune blanc, la fosse était dans l’obscurité et de même absolument tranquille, hormis le cliquetis de la machine. La nuit était belle et sereine ; une planète tentait de scintiller, mais la lune semblait avoir pour elle seule le ciel. Un chien hurla, et c’est ce bruit familier qui me fit écouter. Alors, j’entendis distinctement de sourdes détonations, comme si de gros canons avaient fait feu. J’en comptai six très nettes, et après un long intervalle, six autres. Et ce fut tout.