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riance surprenantes. Le troisième ou le quatrième jour de notre emprisonnement, elle avait envahi tout le talus du trou, et ses tiges, qui ressemblaient à celles du cactus, formaient une frange carminée autour de notre lucarne triangulaire. Plus tard, je la trouvai dans toute la contrée et particulièrement aux endroits où coulait quelque cours d’eau.

Les Marsiens étaient pourvus, selon toute apparence, d’une sorte d’organe de l’ouïe, un unique tympan rond placé derrière leur tête et d’yeux ayant une portée visuelle peu sensiblement différente de la nôtre, excepté que, selon Philips, le bleu et le violet devaient leur paraître noir. On suppose généralement qu’ils communiquaient entre eux par des sons et des gesticulations tentaculaires ; c’est ce qui est affirmé, du moins, dans la brochure remarquable, mais hâtivement rédigée — écrite évidemment par quelqu’un qui ne fut pas témoin oculaire des mouvements des Martiens — à laquelle j’ai déjà fait allusion et qui a été, jusqu’ici, la principale source d’information concernant ces êtres. Or, aucun de ceux qui survécurent ne vit mieux que moi les Marsiens à l’œuvre, sans que je veuille pour cela me glorifier d’une circonstance purement accidentelle, mais le fait est exact. Aussi je puis affirmer que je les ai maintes fois observés de très près, que j’ai vu quatre, cinq et une fois six d’entre eux, exécutant indolemment ensemble les opérations les plus compliquées et les plus élaborées, sans le moindre son ni le moindre geste. Leur cri particulier précédait invariablement leur espèce de repas ; il n’avait aucune modulation et n’était, je crois, en aucun sens un signal, mais simplement une expiration d’air, nécessaire avec la succion. Je peux prétendre à une connaissance au moins élémentaire de