Page:Mercure de France - 1900 - Tome 33.djvu/412

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

remuer sans faire de bruit, et je crois bien qu’ils sont là, dehors.

Nous demeurâmes un instant assis, dans un grand silence et retenant notre souffle. Tout semblait mortellement tranquille, bien que de temps en temps autour de nous, quelque chose, plâtras ou morceau de brique, tombât avec un bruit qui retentissait partout. Au-dehors et très près, s’étendait un grincement métallique intermittent.

— Entendez-vous, demanda le vicaire, quand le bruit se produisit de nouveau.

— Oui, répondis-je, mais qu’est-ce ?

— Un Marsien ! dit le vicaire.

J’écoutai de nouveau.

— Ça ne ressemble pas au bruit du Rayon Ardent », dis-je, et pendant un moment j’inclinai à croire que l’une des grandes machines avait trébuché contre la maison, comme j’en avais vu une se heurter à la tour de l’église de Shepperton.

Notre situation était si étrange et si incompréhensible que, pendant trois ou quatre heures, jusqu’à ce que vînt l’aurore, nous bougeâmes à peine. Alors la lumière s’infiltra, non pas par la fenêtre qui demeura obscure, mais par une ouverture triangulaire entre une poutre et un tas de briques rompues, dans le mur derrière nous. Pour la première fois nous pûmes vaguement apercevoir l’intérieur de la cuisine.

La fenêtre avait cédé sous une masse de terre végétale qui, recouvrant la table où nous avions pris notre repas, arrivait jusqu’à nos pieds. Au-dehors le sol était entassé très haut contre la maison ; dans l’embrasure de la fenêtre, nous pouvions voir un fragment de conduite d’eau arrachée. Le plancher était jonché de quincaillerie brisée ; l’extrémité de