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la guerre des mondes

la poussière noire qui avait été de la fumée, et des cadavres — en tas aux abords de la station — mais nous n’aperçûmes rien des Marsiens jusqu’à ce que nous fussions arrivés près de Barnes.

Dans la distance, parmi le paysage noirci, nous vîmes un groupe de trois personnes descendant en courant un chemin de traverse qui menait vers le fleuve, autrement tout semblait désert. Au haut de la colline, les maisons de Richmond brûlaient activement, mais hors de la ville il n’y avait nulle part trace de Fumée Noire.

Tout à coup, comme nous approchions de Kew, des gens passèrent en courant, et les parties hautes d’une machine marsienne parurent au-dessus des maisons à moins de cent mètres de nous. L’imminence du danger nous frappa de stupeur, car si le Marsien avait regardé autour de lui nous eussions péri immédiatement. Nous étions si terrifiés que nous n’osâmes pas continuer, et que nous nous jetâmes de côté, cherchant un abri sous un hangar dans un coin, pleurant en silence et refusant de bouger.

Mon idée fixe de parvenir à Leatherhead ne me laissait pas de repos, et de nouveau je m’aventurai au-dehors, dans la nuit tombante. Je traversai un endroit tout planté d’arbustes, suivis un passage au long d’une grande maison qui avait tenu bon sur ses bases et je débouchai ainsi sur la route de Kew. Le vicaire, que j’avais laissé sous le hangar, me rattrapa bientôt en courant.

Ce second départ fut la chose la plus témérairement folle que je fis jamais, car il était évident que les Marsiens nous environnaient. À peine le vicaire m’eut-il rejoint que nous aperçûmes la première machine marsienne, ou peut-être même une autre, au loin par-delà les prairies qui s’étendent jus-