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après, ils poussaient une autre acclamation, car, surgissant par delà le tumulte blanchâtre, quelque chose de long et de noir s’avançait, des flammes s’élançaient de ses parties moyennes, ses ventilateurs et ses cheminées crachaient du feu.

Le cuirassé n’avait pas été détruit : le gouvernail, semblait-il, était intact et ses machines fonctionnaient. Il allait droit sur un second Marsien et se trouvait à moins de cent mètres de lui quand le Rayon Ardent l’atteignit. Alors, avec une violente détonation et une flamme aveuglante, ses tourelles, ses cheminées sautèrent. Le Marsien chancela par la violence de l’explosion, et, au même instant, l’épave enflammée, lancée par l’impulsion de sa propre vitesse, le frappait et le démolissait comme un objet de carton. Mon frère poussa un cri involontaire. Tout apparut de nouveau dans un tumulte bouillonnant de vapeur.

— Deux ! hurla le capitaine.

Tout le monde poussait des acclamations. Le steamer entier d’un bout à l’autre trépignait de cette joie frénétique qui gagna, un à un, les innombrables navires et embarcations qui s’en allaient vers la pleine mer.

Pendant plusieurs minutes, la vapeur qui s’élevait au-dessus de l’eau cacha à la fois le troisième Marsien et la côte.

Les aubes du bateau n’avaient cessé de frapper régulièrement les vagues, s’éloignant du lieu du combat ; quand enfin cette confusion se dissipa, un nuage traînant de Fumée Noire s’interposa, et on ne distingua plus rien du Fulgurant ni du troisième Marsien. Mais les autres cuirassés étaient tout près maintenant, se dirigeant vers le rivage.

Le petit vaisseau continua sa route vers la pleine