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la guerre des mondes

et de quelques petits hameaux dont il ignorait les noms. Il n’aperçut que très peu de fugitifs jusqu’à ce que, dans un chemin de traverse aux environs de High Barnet, il trouvât par hasard les deux dames dont il fut, dès ce moment, le compagnon de voyage. Il les rencontra juste à temps pour les sauver.

Il entendit leurs cris de frayeur et, se hâtant, il vit du coin de la route deux hommes qui cherchaient à les arracher de la petite voiture dans laquelle elles se trouvaient, tandis qu’un troisième maintenait avec difficulté le poney effrayé. L’une des dames, de petite taille et habillée de blanc, se contentait de pousser des cris ; l’autre, brune et svelte, cinglait avec un fouet qu’elle serrait dans sa main libre l’homme qui la tenait par le bras.

Mon frère comprit immédiatement la situation, et répondant à leurs cris, s’élança sur le lieu de la lutte. L’un des hommes lui fit face ; mon frère comprit à l’expression de son antagoniste qu’une bataille était inévitable, et, boxeur expert, il fondit immédiatement sur lui et l’envoya rouler contre la roue de la voiture.

Ce n’était pas l’heure de penser à un pugilat chevaleresque, et mon frère le fit tenir tranquille en lui assénant un solide coup de pied. Au même moment, il saisit à la gorge l’individu qui tenait le bras de la jeune dame. Il entendit un bruit de sabot, le fouet le cingla en pleine figure, un troisième antagoniste le frappa entre les yeux, et l’homme qu’il tenait s’arracha de son étreinte et s’enfuit rapidement dans la direction d’où il était venu.

À demi étourdi, il se retrouva en face de l’homme qui avait tenu la tête du cheval et il aperçut la voiture s’éloignant dans le chemin, secouée de côté et d’autre, tandis que les deux femmes se retour-