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au sort de la Machine. Très vaguement, une explication se suggéra qui pouvait être la solution du problème économique qui m’avait intrigué.

« Voici ce nouveau point de vue. Évidemment cette seconde espèce d’hommes était souterraine. Il y avait trois faits, particulièrement, qui me faisaient penser que ses rares apparitions au-dessus du sol étaient dues à sa longue habitude de vivre sous terre. Tout d’abord, il y avait l’aspect blême et étiolé commun à la plupart des animaux qui vivent dans les ténèbres — le poisson blanc des grottes de Kentucky, par exemple — puis, ces yeux énormes avec leur faculté de réfléchir la lumière sont des traits communs aux créatures nocturnes — témoin le hibou et le chat. Et enfin, cet évident embarras au grand jour, cette fuite précipitée, et cependant maladroite et gauche, vers l’obscurité et l’ombre, et ce port particulier de la tête tandis que le monstre était en pleine clarté — tout cela renforçait ma théorie d’une sensibilité extrême de la rétine.

« Sous mes pieds, par conséquent, la terre devait être fantastiquement creusée et percée de tunnels et de galeries, qui étaient la demeure de la race nouvelle. La présence de cheminées de ventilation et de puits au long des pentes de la colline — partout, de fait, excepté au long de la vallée où coulait le fleuve — indiquait combien universelles étaient ses ramifications. Quoi de plus naturel alors que de supposer que c’était dans ce monde souterrain que tout le travail nécessaire au confort de la race du monde supérieur se faisait ? L’explication était si plausible que je l’acceptai immédiatement, et j’allai jusqu’à donner le pourquoi de cette division de l’espèce humaine. Je crois bien que vous prévoyez la tournure de ma théorie, encore que, pour moi-même, j’eusse bientôt découvert combien elle était éloignée de la réalité.

« Tout d’abord, procédant d’après les problèmes