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petits êtres qui s’approchaient. Aucun ne parvint à comprendre mes gestes ; certains restèrent tout simplement stupides ; d’autres crurent à une plaisanterie et me rirent au nez. Ce fut pour moi la tâche la plus difficile au monde d’empêcher mes mains de prendre contact avec leurs jolies faces rieuses. C’était une impulsion absurde, mais le démon engendré par la crainte et la colère aveugle était mal contenu, et toujours impatient de prendre avantage de ma perplexité. Le gazon me fut de meilleur conseil. Environ à moitié chemin du piédestal et des marques de pas où, à mon arrivée, j’avais dû remettre debout la Machine, je trouvai une traînée faite dans le gazon. Il y avait, à côté, d’autres traces de transport avec d’étroites et bizarres empreintes de pas comme celles que j’aurais pu imaginer faites par un de ces curieux animaux qu’on appelle des paresseux. Cela ramena mon attention plus près du piédestal. Il était de bronze, comme je crois vous l’avoir dit. Ce n’était pas un simple bloc, mais il était fort bien décoré, sur chaque côté, de panneaux profondément encastrés. Je les frappai tour à tour. Le piédestal était creux. En examinant avec soin les panneaux, j’aperçus entre eux et les cadres un étroit intervalle. Il n’y avait ni poignées, ni serrures, mais peut-être que les panneaux, s’ils étaient des portes comme je le supposais, s’ouvraient en dedans. Une chose maintenant était assez claire à mon esprit, et il ne me fallut pas un grand effort mental pour inférer que ma Machine était dans ce piédestal. Mais comment elle y était entrée, c’était une autre question.

« Entre les buissons et sous les pommiers couverts de fleurs j’aperçus les têtes de deux petites créatures drapées d’étoffes orange, venant vers moi. Je me tournai vers elles en leur souriant et leur faisant signe de s’approcher. Elles vinrent et, leur indiquant le piédestal de bronze, j’essayai de leur