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MERCVRE DE FRANCE

piteau que les statues, qui sont les meilleures cariatides des intempéries. Il travaille, dort, aime et boit sur la verticalité d’une grande échelle, et n’a point d’autre lampe de ses veilles que la pâleur de sa noce. L’une de ses moindres découvertes est l’invention du tandem, qui étend aux quadrupèdes le bénéfice de la pédale.

Un autre, versé dans l’halieutique, fleurit de ses lignes les voies des chemins de fer de ceinture, comparables aux lits des rivières. Mais les trains, dont l’âge est sans pitié, chassent devant eux les poissons ou écrasent dans leur ventre l’embryon des morsures.

Un troisième roi a retrouvé la langue paradisiaque, intelligible même aux animaux, et perfectionné quelques-uns de ceux-ci. Il a fabriqué des libellules électriques et dénombré les innombrables fourmis par la figure du chiffre 3.

Un autre, remarquable par son visage glabre, nous instruisit de précieux artifices, nous rendant aptes à utiliser nos soirées perdues, consolider nos crédits ivres-morts, et conquérir, sans gaspillage de notre mérite, les récompenses de l’Académie française.

Celui-là même les pensées des hommes par des personnages dont il n’a conservé que la partie supérieure du corps, afin qu’il n’y ait rien en eux que de pur.

Et celui-ci construit un gros livre, afin de compter les qualités du Français, lequel ne serait, aventure-t-il, pas moins brave que galant, ni galant que spirituel ; pour se donner tout à ce labeur, il a profité d’un moment d’inattention de sa jeune postérité pour la perdre dans la futaie d’une promenade de province. Et pendant que nous banquetions en sa compagnie, et des autres rois, sur les divers degres de la grande échelle, Bosse-de-Nage étant chargé d’en caler le pied, les cris sur la place