Page:Mercure de France - 1896 - Tome 17.djvu/379

Cette page n’a pas encore été corrigée

si vous en ayez le courage, nous nous suivrons dans la lutte pas à pas !

Svanhild

. — Nous nous suivrons ?

Falk

. — Voyez, je suis abandonné de tous, je n’ai

aucun ami, je suis en guerre avec tout ce que je connais, contre moi est tournée la flèche de lance aiguë de la haine ; — dites, avez-vous le courage de venir et de tomber avec moi ? mon chemin d’avenir va à l’encontre de l’usage et de la coutume où mille chaînes de prudence embarrassent la marche ; — j’étends pourtant sur toutes ces chaînes, comme tous les autres, une toile, et je mets l’anneau au doigt de mon aimée !

(Il tire un anneau de sa main et le tient en l’air.)

Svanhild

(haletante d’angoisse). — Vous le voulez ?

Falk

. — Oui, et nous montrerons au monde que

l’amour a une puissance éternelle qui le conserve insouillé et dans toute sa splendeur à travers le limon du présent dans la vie journalière. Hier, je montrais le feu de l’idée, qui brille comme le fanal au sommet escarpé de la montagne ; — et vous avez eu peur, vous avez tremblé, car vous étiez femme ; maintenant je vous montre le vrai but de la femme ! Une âme comme la vôtre tient ce qu’elle promet ; voyez le précipice devant vous, — Svanhild, sautez-le maintenant !

Svanhild

(à peine perceptible). — Oh, si nous tombions — !

Falk

(enthousiaste). — Oh non, je vois une clarté

dans vos yeux, qui nous promet la victoire !

Svanhild

. — Prends-moi donc toute, telle que je suis !

Maintenant les feuilles s’ouvrent ; mon printemps commence !

(Elle se jette hardiment dans ses bras, pendant que le rideau tombe.)