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MERCVRE DE FRANCE


Une Rose éblouissante comne un astre Dans un ciel promis aux combats glorieux ! Quelle faute, hélas, enfanta quel désastre Dont s’enténébrèrent les routes des cieux ? Ou si ce fut vraiment comme Dante un ordre Mystérieux qui conduisit le rêveur Vêtu d’une armure où l’Enfer ne pût mordre Dans la Forêt de l’erreur et du malheur ?

Le Poëte au milieu de son chemin sombre S’arrête et triste contemplant le Jadis Se revoit dans sa jeunesse — telle une ombre. Ambitieuse de tous les paradis.


Il se revoit dans toute la belle ivresse De sa jeunesse éprise de l’Absolu — Tel un fol vers une aniérique s’empresse Pour un livre menteur naïvement lu. Il voulait entendre parler dans les nues Les messagers ailés, purs, savants et vrais —-Sans rien perdre cependant des chansons nues Du plaisir qui s’ébat au fond des lieux frais. Ce ne fut pas une mission céleste. Ce fut un téméraire abus de pouvoir Et voilà qu’il faudrait au rèmords qui reste Expier d’avoir espéré tout avoir.


Le Poète dans un désolé silence,Sans plus se rebeller contre aucune loi, Sans invoquer dès lors aucune clémence,Comme un vieil enfant regarde devant soi.