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tre cahos, ſe développe peu-à-peu ; les hommes rougiſſent de leurs premieres erreurs ; & à meſure qu’ils deviennent plus éclairés, ils ſont plus doux, plus modérés & plus traitables ; nos champs ne fument plus du ſang de mille victimes ; le glaive eſt remis dans son fourreau ; le fer ne décide plus les querelles particuliéres ; la cruauté & l’injuſtice, déguiſées ſous le nom de bravoure, n’inſultent plus à l’autorité des Loix ; la politeſſe & les égards réglent les devoirs de la vie civile.

Nos plus vaillans Guerriers, devenus avares de leur ſang, ſans avoir rien perdu de la délicateſſe de leurs ſentimens, ſe refuſent à ces fauſſes preuves de valeur qui les faiſoient courir à la mort par la crainte d’un opprobre imaginaire : ils ſont vaillans ſans brutalité, magnanimes ſans injuſtice ; la victoire a beau les appeller, le devoir les retient & enchaîne leur courage. Ils ſe font une loi de reſpecter le Prince, juſques dans la perſonne même du Sujet ; ils conviennent que les voies de fait entre Particuliers, bleſſent directement les lumières de la Raiſon, les droits de l’humanité, & le reſpect dû au Souverain qui les gouverne.

Telle eſt la révolution qui s’eſt faite dans les mœurs, dans le gouvernement