Page:Mercure de France - 1761-07.djvu/108

Cette page a été validée par deux contributeurs.

une parole peu réfléchie, un ſimple geſte, un ſigne de mépris devenoit le ſignal de la révolte. Ni les égards de l’amitié, ni les liens de la chair & du ſang, ni l’amour de la vie, rien n’étoit capable de tempérer la chaleur de ces eſprits accoutumés à une politique toute guerriére, qui ne connoiſſoit d’autre Loi que celle du plus fort. Les amis révoltés s’armoient contre les amis ; les parens prenoient les armes contre les parens ; tels que ces enfans de la terre, qui avoient reſpiré la mort dès le berceau, ils couroient tous à la vengeances ; & plus les mains étoient ſouillées, plus la victime étoit précieuſe.

Les Loix Civiles qui auroient dû réprimer ces abus, ne ſervirent qu’à les perpétuer & à leur donner plus de cours. Thémis ne peſoit plus les différends à la balance ; elle ne les décidoit qu’à la pointe de l’épée. La foibleſſe ou la mort d’un Gladiateur étoit regardée comme la preuve juridique de l’innocence de l’autre[1] ; & ſouvent pour ſe venger d’un

    de demandes ; il ſuffiſoit que la valeur fût de douze deniers. Beaumanoir, ch. 63. p. 315.

  1. Les Francs prenoient toujours l’événement du combat pour un Arrêt de la Providence, toujours attentive à punir le Criminel. Eſprit des Loix, T. 3. p. 305.