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duiſans de la lumière des Lettres.

Le Corps Politique d’un État doit plutôt ſa ſûreté à la politeſſe qui régne parmi les Membres qui le compoſent, qu’à la ſageſſe des Loix qui le dirigent, & à l’attention ſoutenue du Légiſlateur. Que ſeroit-ce en effet que tout cet amas de Peuples, de Villes, & de Provinces enveloppées ſous une même légiſlation, qu’une confuſion de Puiſſance, embarraſſante pour le Prince, onéreuſe aux ſujets, principalement ſi la lumière des Lettres, qui eſt le fruit de la Raiſon la plus épurée, ne méloit pas ſes douceurs aux amertumes d’une ſoumiſſion forcée ?

Ne cherchons pas loin de nous la preuve de cette vérité. La France qui depuis pluſieurs ſiécles, avoit des loix fixes, des maximes certaines, une conduite ſuivie, n’eſt parvenue à bannir de ſon ſein la fureur du duel, qu’après que la lumière des Lettres a diſſipé le préjugé du faux point d’honneur, & réveillé dans le cœur des Cultivateurs des Arts, les ſentimens de l’humanité. C’eſt alors que les mœurs ſe ſont adoucies, que cet air dur & farouche, que l’exercice des armes y avoit entretenu, & que les loix n’avoient pû détruire, s’eſt diſſipé ; que la Nation enfin eſt parvenue à ce haut point de ſupériorité, qui la fait regarder comme la