Page:Mercure de France, t. 77, n° 278, 16 janvier 1909.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée

MERCVRE DE FRANCK— 1C-1-190g répugne. Si mes sympathies ont pu aller, un certain temps, à l’esprit jacobin, je ne saurais, cependant, les pousser jusqu’à la négationmême de l’espritrépublicain. Savez-vous, monsieur le comte, que les socialistes s’organisent très fortement? Rien qu’à Beauséjour les habitants soient relativement heureux, leurs idées y font d’intéressants progrès. Par leur confusion même, elles séduisent nos paysans, que les impôts écrasent. Ils voient, dans la cité idéale que Rasclard fait se dresser dans le lointain, le remède ù tous leurs maux. — Cependant, vous ne pensez pas, interrompit M. de La Musardière, que les socialistes puissent être pour vous une cause d’échec? — A moins que je ne sois accusé d’être devenu l’auxiliaire de la réaction. Si les socialistes redoutaient mon succès, leur candidat pourrait alors se désister au dernier moment en faveur de Gambade. M. de La Musardière parut réfléchir. — Monsieur Binet, reprit-il, d ’ordinaire, les socialistes ne sont pas riches ; sinon, ils ne seraient pas socialistes. Ras­ clard et Gralaloup ne peuvent être que de pauvres diables... Nous les achèterons. — Nous les achèterons? interrogea Binet. — Eh oui ! nous les achèterons... indirectement. Nous pourrons payer, par exemple, les frais de l’élection de leur candidat, sous la condition qu’il se désistera en votre faveur au second tour, s’il y a ballottage. Binet considéra M. de La Musardière. — Monsieur le comte, dit-il, on dirait que vous avez fait de la politique toute votre vie. « J ’aurai sans doute, reprit-il, les voix de tous les indus­ triels delà région, que le collectitisme effraie. — Ce sera là, reprit M. de La Musardière, un appoint sérieux à notre succès, car ils peuvent vous fournir del’argent. — 11 faudra bien, cependant, que je promette quelque chose aux ouvriers. J’ai songé à un projet de loi sur les retraites ouvrières. — Je ne saurais trop vous approuver. Il est profondément injuste que de vieux serviteurs demeurent sans ressources quand leur âge* et leur santé ne leurpermettent plusle travail. Dans nos familles, nous n’abandonnons jamais nos domesti­