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REVUE DE LA QUINZAINE 3i3 Aussi, par une autre conséquence, l ’ouvrage deM. Dimier relève-t- il surtout, sous ses arguments scientifiquesauxquels il n’y a du reste nul m otif de ne point prendre un sérieux intérêt, d ’une inspiration politique. Cette inspiration peut avoir sa source dans un intérêt assez du même ordre que celui des partis adverses. Cependant, tout bien considéré, en ce qui concerne de larges parties de l’Histoire de France, tout le moyen-âge, par exemple, il est hors de doute que c’est surtout aux écrivains de l’opinion de M. Dimier qu’on deman­ dera, avec quelque chance d’obtenir satisfaction, un point de vue purement historique. Nous faisions récemment cette remarque à propos du livre de M. de Pascal, rapproché de la synthèse humani­ taire et libre-penseuse de M. Edme Champion, et nous la répétons ici. M. Dimier, pour sa part, a marqué ce qui, dans l’esprit contem­ porain, non point dans son irréligion, mais dans son éducation sociale conditionnée en grande partie par l ’intérêt officiel, peut empê­ cher de prendre purement et simplement pour ce qu’ils donnent les faits de la période médiévale de notre histoire (et des autres périodes aussi, mais ceux du moyeu-âge avec plus de fondement, semble-t -il). S ’efforçant, pour la plus ancienne époque, puis pour les deux pre­ mières races, de tenir, dirait-on, la balance égale entre le celtisme, le romanisme et le germanisme, de manière qu’aucune systématisa­ tion plus ou moins tendancieuse ne puisse prendre son amorce ici ou là, M. Dimier, arrivé à l ’établissement capétien, distingue et réfute trois séries de préjugés révolutionnaires qui en obscurcissent la compréhension : le préjugé démocratique et le mépris de la fonction royale; le préjugé économique et le mépris de l’œuvre militaire ; le préjugé féodal et le mépris de l’ordre administratif. Ce dernier préjugé, qui est aussi le fait d’ un certain nombre de conservateurs, et qui peut, quand il s’agit de Philippe le Bel, arrêter des écrivains comme M . de Pascal, est, pour M. Dimier, l’occasion de montrer l ’humeur quelque peu outrancière et tranchante qu’ il m et au service de sa logique d’historien positiviste. Au sortir de l’époque de saint Louis, le règne de Philippe le Bel gênera toujours un peu certaines délicatesses. Au contraire, le ton de M. Dimier est ici élogieux. Les Templiers, Boniface VIII, la fausse monnaie, — la fausse monnaie, l’altération de la monnaie? simple mesure d’Etat, — rien ne peut faire oublier l ’ordre administratif établi par ce roi. Et la disqualification politique de la Noblesse ? Peu importe. L’Humanisme, à partir de François I*r, embarrassera toujours aussi les esprits imbus de traditionalisme : ils hésitent à le comprendre dans la vraie tradition positive de l’Histoire de France : les causes de la Révolution, selon une opinion souvent émise, ne commencent-elles pas avec lui? M. Dimier ne s’attarde pas à ces scrupules, et, rame­