Page:Mercure de France, t. 76, n° 274, 16 novembre 1908.djvu/62

Cette page n’a pas encore été corrigée

MERCVRE DE FRANCE— 16-xi-1908 Les classes possédantes n’ entendent pas lui laisser l’initiative ni le pouvoir, mais elles redoutent ses mouvements concertés ou instinctifs ; elles se rendent parfaitement compte que toute lutte européenne fournirait des aliments nouveaux à la révo­ lution, qu’elle pourrait ouvrir le champ à une subversion vio­ lente ; et c’est le souci de la conservation de l ’Etat, plus que tout autre, qui, par intervalles, vient entraver leurs poussées belliqueuses et sauvegarder des milliers de vies humaines. On peut même se demander si le prolétariat a intérêt à la pro­ longation de la paix ou à une soudaine explosion des forces brutales. Mais tel n’est point notre sujet. Je me suis borné ici à exposer les raisons qui militent en faveur d’une guerre anglo-allemande, et celles qui militent contre cette conflagration. J ’ ai laissé soigneusement de côté l’hypothèse d’une entrée en lice de la France, d’abord parce que l ’apparition d’un élément nouveau eût étrangement com­ pliqué le problème, et ensuite parce que rien ne prouve qu’en cas de choc armé le peuple français voudrait, selon l’e x­ pression classiquement adoptée, servir d’otage. Et j ’ ai la conviction, tout au rebours, que le véto opposé par les travail­ leurs de la « puissance otage » à une intervention de leur go u ­ vernement pourrait circonscrire le champ de bataille et même écarter la possibilité du conflit attendu. PAUL LOUIS.