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L’ANTAGONISME ANGLO-ALLEMAND a35 bie n l’EmpirûGermanique couperait court à des velléités renais­ santes, en attaquant sa voisine avan tl’heure que cette dernière eût fixée pour sa mobilisation. Le heurt de la baleine et de l’éléphant, comme l’on disait alors, terrorisait par avance les esprits inquiets. Depuis le jour où les avant-gardes anglo- indiennes et cosaques s’ étaient rencontrées dans l’Asie Centrale, la bataille future n’ était plus mise en doute, et l’invasion de l’Indoustan par les armées du Tsar ou le bombardement de Cronstadt par les escadres britanniques défrayaient par avance les récits conjecturaux des nouvellistes. Plus récem­ ment encore, lorsque les victoires du Japon eurent manifesté son organisation militaire, ses velléités conquérantes, sa con­ fiance en soi-même, et décelé comme un plan d’occupa­ tion progressive et d’usurpation méthodique de l’Extrême- Orient et du Pacifique, la guerre américano-nipponne fut an­ noncée à grand fracas. La question de l’immigration jaune en Californie donnait un thème à des raisonnements qui, durant tout un été, remplirent la presse des Deux Mondes. Cet hiver encore, et sans aucune discrétion, l ’ on mit en évi­ dence la concurrence austro-russe dans les Balkans, à propos des projets de chemins de fer de M .d ’Æhrenthal,de l’annexion de la Bosnie et de l’émancipation bulgare et d’ aucuns en déduisirent (ils faillirent avoir raison) que le problème oriental pourrait bien, une fois de plus, incendier l’Europe. Or, à l’heure actuelle, l ’on reparle surtout de l’ antagonisme anglo-allemand. C’ est lui qui fait couler l’ encre, qui accapare les enquêtes, qui monte à l’horizon, comme si toute la poli­ tique internationale se ramassait autour de lui, comme s’il absorbait les oppositions secondaires et les rivalités annexes. Il domine les relations mondiales, de même que l’hostilité franco-britannique surplombait en quelque sorte les rap­ ports européens au temps de Napoléon et des grandes coali­ tions continentales. Dans le plan diplomatique, il joue le même rôle que la guerre des socialistes et du capitalisme dans le plan social. Je ne veux signaler ici que quelques éléments, que des don­ nées particulièrement notoires du problème posé. L ’ Allemagne prétend que le roi d’Angleterre a multiplié ses efforts pour l’en­ cercler, etqu’ila — ou peu s’en faut — abouti à ses fins. Autour d’elle il a groupé la France, la Russie, l’Espagne, tandis qu’il