Page:Mercier - Tableau de Paris, tome X, 1788.djvu/57

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 55 )

que ce château sorte aussi promptement de terre qu’une asperge dans la belle saison. Il faut des plantations d’arbres en salle, étoiles, bosquets, allées à perte de vue, tous arbres aussi stériles que l’esprit de l’opulent bâtisseur. Quand le château est fini, il faut encore de l’eau jaillissante, un bel étang & un pont. Que faut-il encore ? un jardin anglois, pour singer les princes ! Jamais, peut-être, les flottes angloises ne nous ont fait autant de mal, que le goût fatal d’imiter en petit leurs superbes possessions.

Eh ! combien cela dure-t-il ? l’espace d’un moment. On ne voit de toutes parts que maisons, que châteaux à Vendre. Ces lieux où la rapine enfouissoit ses trésors, où le luxe déployoit ses ruineuses fantaisies, ces palais de la volupté, sont achetés à vil prix, & démolis par les mêmes ouvriers qui les ont construits, & qui revendent les matériaux à d’autres fous, également tourmentés de la manie de la bâtisse.