Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VIII, 1783.djvu/68

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 66 )

ton œil ; cette collection ne sera jamais parfaite ; ces magnifiques jardins t’inspireront du dégoût : mais le soupir d’un malheureux qui t’exprimera sa reconnoissance, ne sera jamais perdu tant que tu conserveras un cœur !

Le riche est plus près de la vertu que tout autre homme. S’il s’en éloigne, il devient plus coupable, car le pauvre est plutôt exempt de vices que vertueux ; il n’a pas les moyens de l’être. Qui le croiroit ? La gloire elle-même, à mérite égal, favorise bien plus le riche que celui qui est né sans fortune. Elle semble vouloir, a dit quelqu’un, le récompenser de s’être Occupé d’elle.

Bullion, ministre dans le dernier siecle, imagina de donner un dîner d’une espece nouvelle. Il fit servir des plats remplis de pieces d’or & d’argent, & dit aux convives d’en prendre sur leurs assiettes à discrétion. Chacun se jeta avidement sur ce fruit nouveau, en remplit ses poches, & s’enfuit avec sa proie.

Ce n’est point là de la générosité, il s’en faut. Riche, sache mieux donner. Cette grande