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assez maître de ses passions, assez impartial, assez éclairé & doué d’un tact assez subtil pour être le juge suprême des talens & des réputations ? Que le tems prononce ; c’est à lui seul qu’appartient cet emploi.

Mais ce qui doit consoler les auteurs, c’est de voir que le plus impitoyable des critiques est toujours un auteur méprisé. Qui se sent des forces pour courir dans la carriere, ne s’amuse pas à jeter des bâtons aux jambes de ceux qui courent.

Tous ces jugeurs sont plus intrépides dans leur prononcé, & plus orgueilleux de leurs extraits, que les auteurs ne le sont de leurs productions. Ils prennent le talent d’injurier & de nuire pour la preuve d’une supériorité réelle & décidée.

Ainsi l’on ne voit plus dans l’attelier des arts,
Que légions de rats & grouppes de lézards.
Leur souffle empoisonné flétrit les renommées,
Le Pinde est envahi par d’insolens Pygmées.
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Ces docteurs pointilleux dans leur triste manie,
Le scalpel à la main, dissequent le génie ;