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là les ressorts de trop près, n’ont plus les jouissances qu’ils communiquent. Il faut perdre de vue les coulisses ; il faut même les oublier pour entreprendre un nouvel ouvrage.

Que celui qui chérit l’art & qui ne veut pas en perdre le sentiment exquis, s’abstienne de voir le jeu anatomique de nos spectacles ; il y a de quoi guérir les plus intrépides amateurs de Melpomene & de Thalie. Ces déesses ont perdu leurs attraits à la fumée des lampions ; & tous ces héros de théatre n’ont plus que des physionomies qui vous repoussent autant qu’elles vous charmoient dans l’heureux point de vue.

Il ne faut donc point le quitter, si l’on veut que l’illusion subsiste ; & le meilleur moyen, je crois, pour convertir le jeune homme trop atteint de la manie du théatre, seroit de le faire circuler dans les coulisses pendant quelques mois. C’est là que le fantôme de la renommée littéraire tout-à-coup se décompose, & qu’il faut une tête forte pour surmonter ce coup-d’œil. Il décourage, il attriste, il émousse nos pinceaux.