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par les loix même, qui ont fait des propriétés exclusives du moindre pouce de terre ou d’un misérable plancher, n’a pas de quoi reposer sa tête. Il ne pourra habiter un grenier entr’ouvert que sous le bon plaisir d’un maître superbe ; des propriétaires le pousseront des champs ; tout est pris, tout est envahi.

L’homme, dans nos gouvernemens modernes, en recevant son corps de la nature, n’obtient point des loix civiles une place en propre pour y respirer. On lui accorde l’espace d’un tombeau ; mais celle d’un berceau lui est interdite.

Beaucoup d’hommes, n’ont à la lettre, que leurs bras pour le service du maître à qui ils sont vendus. Qui ne possede rien, est nécessairement l’ennemi de ceux qui possedent.

Le pauvre n’a presque point de ressources ; il faut qu’il soit malade pour qu’on ait soin de lui. On l’enterre pour rien lorsqu’il est mort, parce que son cadavre infecteroit. On le recueille lorsqu’il agonise. Ne vaudroit-il pas mieux