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ment coûteuses, qu’il n’y a point de fortune, pour ainsi dire, qu’il ne vienne à bout de miner. Jamais siecle n’a été plus prodigue que le nôtre. On consomme ses revenus entiers, on dévore ses capitaux, on étale une surabondance scandaleuse, on veut effacer son voisin, & pour se soutenir dans un état forcé, l’on a recours à des ressources qui devroient rendre les richesses odieuses.

Quoi ! ne sauroit-on manger & faire bonne chere sans avoir un service coûteux, que le faux pas d’un laquais peut réduire en poussiere ? Faut-il que la vaisselle soit de l’orfevre à la mode, & qu’on refonde tous les ans son argenterie ? Faut-il un maître-d’hôtel tout galonné, pour tenir une serviette derriere votre fauteuil, & qui vous ruine pour bâtir des desserts auxquels on ne touche presque pas ? Faut-il plusieurs laquais pour être plus mal servi que s’ils étoient réduits à un petit nombre ? Faut-il trente chevaux pour aller souper en ville deux fois la semaine ?

Quelle est cette extravagance de l’imagi-