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Ce vaste bâtiment est en pierres ; le vieux soldat est enfermé dans des murailles épaisses. Ces voûtes où le soleil ne pénetre pas même en été, paroissent rendre ce grand lieu, bien froid, bien sombre, bien ennuyeux pour la vieillesse. De longs corps de bâtimens, des escaliers noirs, des corridors glaçans, impriment à ce grand édifice quelque chose de triste.

Les soldats y sont logés pêle-mêle, & la propreté n’a pu s’établir dans ces salles spacieuses. Mais les officiers y sont bien en comparaison du soldat ; les officiers m’ont tous paru assez contens de leur sort, & cet aveu peut tenir lieu d’une louange complete.

Il n’y regne pas la même fraternité que dans les camps. Chacun s’isole, & l’indifférence la plus absolue regne entre ces êtres jadis si unis. C’est qu’il n’y a plus le danger des batailles, ni la société d’armes, ni le poids des fatigues à soutenir ; les régimens mêlés, les soldats ne se reconnoissent plus. De là peu d’échanges de bienfaits ; l’esprit militaire ne