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favorites, & les autres en seroient les gardiennes.

Plusieurs vont le matin aux toilettes avec des pompons dans leurs corbeilles. Il faut parer le front des belles, leurs rivales ; il faut qu’elles fassent taire la secrete jalousie de leur sexe, & que par état, elles embellissent toutes celles qui les paient & qui les traitent avec hauteur. Quelquefois le minois est si joli ; que le front altier de la riche dame en est effacé. La petite marchande en robe simple se trouve à une toilette dont elle n’a pas besoin ; ses appas triomphent & effacent tout l’art d’une coquette. Le courtisan de la grande dame devient tout-à-coup infidele ; il ne lorgne plus dans le coin du miroir que la bouche fraîche & les joues vermeilles de la petite qui n’a ni Suisse ni aïeux.

Plus d’une aussi ne fait qu’un saut du magasin au fond d’une berline angloise. Elle étoit fille de boutique ; elle revient un mois après y faire ses emplettes, la tête haute, l’air triomphant, & le tout pour faire sécher d’en-