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proscrivoit les beautés mâles & originales, les compositions fortes & transcendantes. On eût dit qu’il avoit peur du génie. Enfin, il sembloit vouloir plier à une même mesure tous les talens, & méconnoître la variété féconde & sublime de la nature dans les différens moyens qu’elle a donnés à ses favoris pour la peindre & la chanter.

Il n’avoit point d’organes pour la musique, ni d’yeux pour la peinture : ces deux arts étaient entiérement perdus pour lui ; il admiroit des ponts neufs & s’environnoit de croûtes. Ce qu’il a écrit sur les arts ne porte point l’empreinte d’une ame passionnée. Sa composition étoit beaucoup plus large que sa poétique seche, misérable & mesquine.

Il goûtoit plus Racine & Massillon que Shakefpear Homere & Tacite. Il ne sentoit pas la Fontaine ; il avoit fort mal lu Montesquieu ; il ne voyoit pas tout ce qui est dans Montaigne & dans Rabelais. Son imagination étoit rebelle à saisir ce qui contrarioit son goût factice.