Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IX, 1788.djvu/4

Cette page a été validée par deux contributeurs.
( 2 )

On paie vingt-quatre livres pour deux enragés. Afin d’épargner ses chevaux, on prend des enragés. L’animal tout en sueur attend à la grille ; il est maigre, efflanqué. On ne nourrit ces chevaux qu’avec du foin, de sorte qu’ils sont toujours échauffés.

Mais que ces enragés sont précieux, lorsque, tout dégouttans de sueur, ils portent rapidement aux pieds du trône un sage qui va y présenter l’examen & le calme de la raison, au milieu des passions orageuses, toujours précipitées & toujours mauvaises conseillères.

Versailles est le pays des chevaux. On en voit de toutes parts des troupeaux nombreux ; les écuries des princes rivalisent avec celles du monarque. Malgré les réformes, on y voit encore presque autant de chevaux que d’hommes. Il y a parmi les chevaux qui sont à Versailles, la même différence que parmi les habitans de la ville : ceux-ci, gras, bien nourris, bien dressés, ont des graces particulières ; ceux-là sont d’une triste encolure, ne voiturant que les valets de cour ou les