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Le commissaire arrive, & n’y comprenant rien lui-même, imagine la satyre la plus effrénée. Il couvre respectueusement du pan de sa robe l’affiche prétendue scandaleuse. On la détache avec le plus grand soin, pour la porter au lieutenant de police. L’inspecteur & les exempts forment un rempart, & empêchent les regards de la multitude de se porter sur l’imprimé. On le tourne du côté blanc comme pour voiler la scélératesse du noir. Que dit cette affiche ? on n’en sait rien ; & conséquemment cela signifie les choses les plus monstrueuses. Telle est la logique des exempts & des inspecteurs.

Ils arrivent en tremblant chez le magistrat, déposent l’imprimé. Tous les déchiffreurs, les algébristes sont mandés. On épuise les combinaisons : oh ! c’est la langue du diable ; mais cette langue dit beaucoup. Chacun hasarde ses conjectures. Il y a une infernale malice sous ces mots ; car enfin ce sont des lettres françaises. L’imagination enfante bien vite un libelle diffamatoire contre des personnes sacrées, & pis encore.