Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IX, 1788.djvu/159

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
( 157 )

cuisines bourgeoises. Tout le quartier en retentit, & l’épicier du coin confirme la réaction de ces déplacemens. La rusée servante se place avec le laquais qu’elle a choisi, & les mensonges sont tout prêts & bien arrangés pour faire accroire aux maîtres nouveaux qu’ils ne se sont jamais vus.

Comme à Paris le maître & le domestique ne sont jamais liés que de leur propre volonté, les mutations sont fréquentes & rapides. Telle maîtresse essaie dix servantes dans un mois. Celles-ci, accoutumées à faire leur paquet, passent de maison en maison, en baptisant du mot de baraque toutes celles où la cuisine est maigre, ou surveillée de trop près : Un bon maître est celui qui soupçonne à peine le prix des denrées, que la livre est de seize onces, & qu’elle doit produire un certain effet. Le meilleur des maîtres seroit celui qui s’abreuveroit soir & matin avec les eaux du Léthé.

Heureuse celle qui, jeune encore, entre chez un vieux garçon ! Elle met à profit ce coup du sort ; elle en tire très-bon parti