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ronnent ; on imagine des sensations nouvelles pour les lui apporter ; il a toutes les jouissances, point de besoin qui ne soit satisfait : on lui épargne jusqu’aux desirs : quelle idée, dans ce rang élevé, a-t-il de tout ce qui l’environne ?

Tout sujet donc qui est à portée de voir le roi, fait le voyage de Versailles ; il entre dans le château magnifique ; il voit défiler toute la cour : mais il la verroit tous les jours pendant cent années de suite, il fouleroit pendant un siècle & demi le parquet des longs appartemens, que ses connoissances resteroient précisément au même point.

L’air de cour s’imprime dans un garçon de la chambre, dans un petit contrôleur. Celui qui met un soulier à un prince, (soulier qu’il n’a pas su faire) s’estime au-dessus du cordonnier ; car c’est une charge.

Autant le grand seigneur affecte une contenance modeste, devenu souple, de fier & de superbe qu’il étoit la veille, autant les valets prennent un ton qui, par-tout ailleurs, seroit l’excès du ridicule.