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& des tableaux vivans & instructifs qu’ils demandent. Faut-il alors s’étonner si la multitude ne connoît seulement pas le nom de nos auteurs tragiques ?

Il n’y a presque plus que les gens de lettres qui soient infatués de ces esquisses imparfaites, & qui s’en occupent avec un stérile déluge de paroles ; mais tandis qu’ils sont fort habiles à multiplier d’oiseuses dissertations, l’art n’en fait pas un seul pas de plus. Nos tragédies continuent à n’offrir que des reflets pâles, une imitation servile ; & la génération actuelle de nos auteurs attestera à la suivante, l’opiniâtreté du goût le plus faux & le plus déraisonnable.

Jeunes écrivains, voulez-vous connoître l’art, voulez-vous le faire sortir des bornes puériles où il est enchaîné ? laissez là les périodistes & leurs préceptes cadavéreux. Lisez Shakespeare, non pour le copier, mais pour vous pénétrer de sa maniere grande & aisée, simple, naturelle, forte, éloquente ; étudiez-le comme le fidele interprete de la