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que cela les soutient le plus souvent jusqu’au soir. Ainsi ils ne font plus que deux repas, le grand déjeuner & la persillade du soir, dont j’ai parlé ailleurs.

Le matin, les libertins sortent de chez les filles publiques, pâles, défaits, emportant la crainte plutôt que le remord ; & ils gémiront tout le jour de l’emploi de la nuit : mais la débauche ou l’habitude est un tyran qui les saisira le lendemain, & qui les traînera à pas lents vers le tombeau.

Les joueurs plus pâles encore sortent des tripots obscurs ou renommés ; les uns se frappant la tête & l’estomac, jetant au ciel des regards désespérés ; les autres se promettant de revenir à la table qui les a favorisés, mais qui doit les trahir le lendemain.

Les loix prohibitives ne feront rien contre cette malheureuse passion mise en activité par cette soif de l’or, qui s’est manifestée dans tous les rangs, & que les gouvernemens autorisent eux-mêmes sous le nom de loteries, mais qu’ils proscrivent sous une autre dénomination.