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maisons, l’intendant habiter l’hôtel que son maître occupoit. Et comment ont-ils acquis les biens du dépouillé ? En lui prêtant ses propres capitaux.

Ces courtiers officieux paroissent rarement ; ils ont des prête-noms. Il font naître des momens de détresse, & ils en profitent. Une usure cachée & homicide reproduit à des conditions onéreuses les especes dont on occasionne la rareté. Cet essaim engloutit les plus grosses fortunes ;

Et l’avare Achéron ne lâche point sa proie.

Tel autre entremetteur, sans avoir un sol, achete une terre dont il paie une petite somme qu’il a empruntée. Il devient réellement propriétaire, jusqu’à ce qu’on le dépossede. Il faut quatre ou cinq années pour en venir à bout. Pendant ce tems il jouit, fait des coupes de bois, dit, mes vassaux ; & ce n’est qu’après un long combat qu’il restitue la seigneurie. Il n’a rien payé ; il a vécu sur le fonds d’autrui, & les paysans l’ont appellé monseigneur. Ces hommes-là savent très-bien