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contraires se succédant d’un instant à l’autre. Tel est aux yeux du philosophe le spectacle de la mode.

Cent ans ne sont pour lui qu’un jour ; & il trouve la race humaine aussi singuliere de changer d’avis deux fois dans un siecle, que s’il voyoit un particulier démentir son assertion une heure après l’avoir exposée.

La rotation perpétuelle du cercle des événemens lui donne une légere teinture de l’instabilité des idées humaines ; & considérant les variations infinies de l’espece, il pardonne au ridicule régnant, qui bientôt va être remplacé par un ridicule tout contraire.

Quand une opinion a été amenée par la mode, rien ne la déracine qu’une nouvelle invasion de la folie. L’autorité, la sagesse sont impuissantes contre la déraison universelle. Les sots sont les ministres de la mode ; ils la respectent, ils regardent ses jeux comme des loix essentielles.

Le sage peut très-bien s’exempter d’adopter les modes nouvelles ; mais il ne faut