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CHAPITRE CXLII.

Libraires.


Les libraires se croient des hommes de conséquence, parce qu’ils ont l’esprit d’autrui dans leur boutique, & qu’ils se mêlent quelquefois de juger ceux qu’ils impriment.

Il n’y a rien de plus comique que le début timide & avantageux d’un poëte qui grille d’être mis au jour, & qui aborde pour la premiere fois un typographe de la rue Saint-Jacques, lequel se rengorge, & se rend appréciateur du mérite littéraire. Il reçoit un chef-d’œuvre avec un froid accueil, & souvent il est plus terrible & plus cruel envers l’auteur débutant, que la meute des journalistes & l’inexorable public.

Comme cette branche de commerce est, à Paris, dans la dépendance la plus humiliante, les libraires sont devenus des marchands de papiers noircis : ils chérissent de