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du Tibre. Les noms de Brutus, de Caton & de Scipion me poursuivoient dans mon sommeil ; on entassoit dans ma mémoire les épîtres familieres de Cicéron ; tandis que, d’un autre côté, le catéchiste venoit le dimanche, & me parloit encore de Rome, comme de la capitale du monde, où résidoit le trône pontifical, sur les débris du trône impérial : de sorte que j’étois loin de Paris, étranger à ses murailles, & que je vivois à Rome que je n’ai jamais vue, & que probablement je ne verrai jamais.

Les décades de Tite-Live ont tellement occupé mon cerveau pendant mes études, qu’il m’a fallu dans la suite beaucoup de tems pour redevenir citoyen de mon propre pays, tant j’avois épousé les fortunes de ces anciens Romains.

J’étois républicain avec tous les défenseurs de la république ; je faisois la guerre avec le sénat, contre le redoutable Annibal ; je rasois Carthage la superbe, je suivois la marche des généraux Romains & le vol triomphant de