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Profusionner. Nous donner un tel repas ! ah ! c’est Profusionner. Il a Profusionné son bien sans joie, sans plaisirs, sans dignité. Profusionner la vie, c’est l’erreur d’un très-jeune homme.

Prolétaire. C’est celui qui ne possède aucune propriété. Dieu du ciel ! naître ! et n’avoir pas à soi, sur le globe, la place de son berceau ! Ô lois humaines ! Pour que toute république fleurisse, il faudrait que chaque citoyen fût propriétaire, et se montrât jaloux des devoirs et des droits que ce titre suppose ; car il n’y a point de patrie pour quiconque n’a aucun lien qui l’attache au sol qu’il habite. Ma tête tourne quand je creuse le mot gouvernement. Ô magie !

Malheur ! malheur à une nation divisée en deux classes nécessairement ennemies, celle des propriétaires et celle des Prolétaires !

Prolétaire ! c’est le mot le plus repoussant de la langue ; aussi tous les Dictionnaires l’ont-ils rejeté. J. J. Rousseau n’avait pas en propriété un carré de choux ; mais sa tête valait bien un carré de choux : je veux dire qu’il a imprimé par ses écrits et sa musique, un mouvement commercial et productif qui ne le rangeait plus dans la classe des Prolétaires. Il en est de même d’un médecin qui n’a pas une pomme, et qui fait payer ses ordonnances à des électeurs ; ou d’un peintre qui fait entrer en France dix mille écus,