Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/74

Cette page a été validée par deux contributeurs.

crime aux yeux de la multitude. Au milieu de nos agitations elle n’avait joué aucun rôle ; rien ne pouvait la rendre suspecte aux yeux du peuple, dont elle n’était connue que par des actes multipliés de bienfaisance. Les écrivains les plus fougueux ne l’avaient jamais signalée dans leurs feuilles.

Le trois septembre, on l’appelle au greffe de la Force ; elle comparaît devant le sanglant tribunal composé de quelques particuliers. À l’aspect effrayant des bourreaux couverts de sang, il fallait un courage surnaturel pour ne pas succomber.

Plusieurs voix s’élèvent du milieu des spectateurs et demandent grâce pour madame de Lamballe. Un instant indécis, les assassins s’arrêtent ; mais, bientôt après elle est frappée de plusieurs coups, elle tombe baignée dans son sang, et expire.

Aussitôt on lui coupe la tête et les mamelles, son corps est ouvert, on lui arrache le cœur, sa tête est ensuite portée au bout d’une pique, et promenée dans Paris ; à quelque distance on traînait son corps.

Les tigres qui venaient de la déchirer ainsi, se sont donné le plaisir barbare d’aller au Temple, montrer sa tête et son cœur à Louis XVI et à sa famille.

Tout ce que la férocité peut produire de plus horrible et de plus froidement cruel, fut exercé sur madame de Lamballe.

Il est un fait tel que la pudeur laisse à peine d’expressions pour le décrire ; mais je dois dire la vérité tout entière et ne me permettre aucune omission. Lorsque madame de Lamballe fut mutilée de cent manières différentes, lorsque les assassins se furent partagé les morceaux sanglants de son corps, l’un de ces monstres lui coupa la partie virginale et s’en fit des moustaches, en présence des spectateurs saisis d’horreur et d’épouvante.