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Cette licence bouffonne fit le plus grand tort au roi, que le hasard attaquait jusque dans l’arrangement de quelques lettres ; et l’on trouva plusieurs fois ces deux vers parodiés de Voltaire, affichés au coin des rues :

Les cornes ne sont pas ce qu’un vain peuple pense ;
Ils furent tous cornards, tous ces beaux rois de France !


TRAITÉ COMME UN CHIEN

Expression qui circulait dans la société aux premières années de la révolution, et dont voici l’origine.



Sous l’ancien régime, les pensions sur le trésor qu’on appelait royal, montaient à plus de cent millions. Observez que celles accordées aux anciens sujets de l’Académie royale de musique s’élevaient à plus de deux cent soixante-dix-huit mille livres ; observez qu’on en donnait une de six mille livres au coiffeur de Mademoiselle d’Artois, qui, morte avant trois ans, n’avait point de cheveux ; mais observez aussi, que le gouvernement devenait économe dans certaines circonstances. Par exemple, le brave Aude, qui avait fait prisonnier le général Ligonier à la bataille de Laufeld, et qui avait contribué à la victoire ; hé bien ! le trésor royal lui accorde une pension de deux cents livres. Par économie cependant, on a eu soin, au moyen des retenus de la réduire à cent quatre-vingt-huit livres trois sols, qu’on a enfin totalement oublié de lui payer. Voici un trait, soit dit en passant, qui prouve que, sous l’ancien régime, nos braves soldats étaient traités avec beaucoup moins d’humanité que les chiens de sa majesté. Prenez le compte rendu en 1788, par le calotin de Brienne[1], et vous y lirez : « Pour la nourriture des chiens de sa majesté, à raison de huits sols, six deniers par jour, pour chaque chien : quarante mille livres. Pour la remonte desdits chiens, par an : dix

  1. Cardinal de Loménie.