Page:Mercier - Le Nouveau Paris, 1900.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.

su prévoir, empêcher la chute de leurs privilèges. L’abbé Maury, leur avocat, et qui, par son imprudente et excessive confiance en un vain ramage de paroles, leur avait fait plus de mal que de bien, fut enveloppé dans la disgrâce de leur réprobation ; ils ne s’intéressèrent ni à lui, ni à son frère lorsqu’il périt sur un échafaud. Tout ce que le genre déclamateur a de singulier, de curieux, tant en véhémence qu’en extravagance passa dans les conversations et dans les brochures, et produisit une cataracte bruyante de phrases inutiles. Le style de Mallet Dupan fit tapage avec celui de Durosoi[1] et de Barruel-Beauvert[2], et tout ce son enflé, continu, monotone, tomba dans les abîmes de l’oubli et de la dérision.

C’est pour avoir mis presque tous les personnages de la Révolution sur la même ligne ; c’est pour n’avoir point su distinguer Condorcet de Marat, et Brissot de Robespierre, que le journalisme effronté a recueilli tout le mépris qu’il y méritait ; c’est en niant la vertu des représentants fidèles, qu’on a enhardi le Montagnard féroce et cet être au-dessous même du médiocre tant du côté des talents et des moyens que du côté des vertus patriotiques et des qualités personnelle, cet homme sans couleur et sans physionomie, le nain appelé Robespierre qui aveuglait les gueux et les sans-culottes. Les invectives grossières versées sur le parti de la Gironde, cet acharnement contre des hommes irréprochables, ces dominations absurdes, d’hommes du marais changés en crapauds, ont fait les Collot d’Herbois, les Carrier, les Lebon et autres de cette espèce ; les ennemis de la Révolution crurent tout gagner en chargeant d’injures les Brissottins, les Girondins, les Rolandins, ce sont eux qui ont dressé les échafauds, parce que la Convention nationale opprimée et avilie pendant deux années entières à la suite

  1. Guillotiné au 25 août ; il dit que le plus beau jour d’un royaliste étoit de mourir le jour de la fête de saint Louis. (Note de Mercier).
  2. Après s’être offert pour otage de Louis XVI, cet écrivain se rallia plus tard à Napoléon.