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L’INDICATEUR DES MARIAGES


C’est le nom d’un bureau, et le titre d’un journal dont le frontispice offre, comme l’on voit, une image à demi agréable, et qui promet un peu plus que le Menteur, la Chauve-souris ou la Petite Poste. Il s’agit d’un truchement habile et discret qui fait sans honte et avec l’approbation des lois, le négoce des cœurs.

Avec son secours, l’homme muet par timidité, ou qui, après avoir consulté son miroir, ne se trouve plus ni jeune, ni beau, parle, sollicite sans être vu, ne se montre, pour ainsi dire, que par réverbération jusqu’au dénouement. Ce bureau a, à ses ordres, jusqu’à un poète qui fait des madrigaux et des acrostiches à prix fixe ; et l’on se saurait croire combien cela soulage quelquefois le demandeur.

Celui donc, ou celle qui se propose, ne manque pas d’annoncer le beau côté de son individu, c’est-à-dire, sa fortune, son revenu net en biens fonds, en immeubles territoriaux, le produit de son état actuel, et surtout ses prétentions pour l’avenir.

Afin d’imprimer à cette annonce un attrait inévitable, on glisse certains mots bien doux, certaines phrases toutes préparées, suaves, mielleuses, qui font l’office d’un miroir en miniature, et qui aident à deviner la figure, la taille, les proportions du corps, la complexion, le tempérament, le tout sous un jour favorable.

On ajoute à ces invitantes prémices la petite note des talents agréables, comme le chant, le forte-piano, la clarinette, la harpe : mais sur ce qui concerne l’économie, la modestie de la parure, le goût des devoirs domestiques, on n’en parle point, parce qu’apparemment cela se suppose.

Les entremetteurs sont des gens très polis ; on passe dans leurs bureaux comme l’on se trouverait chez un